L’Inconnue du portrait.
Le Tour des Livres.
S’il fallait décerner un prix au meilleur roman de la rentrée de janvier, il irait certainement à Camille de Peretti pour « L’Inconnue du portrait » paru chez Calmann-Lévy. Elle construit son intrigue à partir d’une curieuse histoire vraie. Un tableau de Klimt, représentant une jeune femme, peint en 1910, a été repris par le peintre sept ans plus tard, pour y représenter la même jeune femme inconnue, dans une tenue différente. Entre temps, le tableau avait été acheté par un collectionneur tout aussi inconnu. Puis il fut volé en 1997dans un musée italien, le voleur n’ayant jamais été identifié, et restitué anonymement en 2019. Tant de mystères sont ils liés ? Camille de Peretti va s’y employer en imaginant Martha, la jeune femme pauvre qui posa pour modèle. Elle meurt à Vienne, de la grippe espagnole, en laissant un enfant seul au monde. Isidore n’a pour tout héritage que le nom de son père, un riche Viennois qui ne connait pas son existence. La vie d’Isidore structure le roman. On le retrouve cireur de chaussures à New York, amoureux de Lotte, une jeune bourgeoise. Puis riche et puissant industriel, mais son passé inconnu l’obsède. Quand il découvre, dans le journal, ce tableau où il reconnait sa mère, morte bien des années plus tôt, un monde nouveau s’ouvre devant lui. Il lance son enquête …. Un roman puzzle qui se construit sous nos yeux, un modèle dans l’art d’écrire, de s’inspirer du réel pour créer une fiction plus vraie que la vérité. « L’Inconnue du portrait » vient d’obtenir le prix des Romancières et est en lice pour le prix des Libraires.
Paru chez Grasset, « Il n’y a pas de Ajar », de Delphine Horvilleur est un petit bijou de lecture philosophique. Elle analyse l’affaire Ajar, ce pseudo qui permit à Romain Gary d’obtenir deux fois le prix Goncourt. Femme rabbin, elle étudie les pseudos : Gary veut dire « l’étranger » et Ajar : « l’autre ». Tout est affaire d’identité. Jeux de mots, jeux d’esprit sur l’identité et l’existence de soi et de Dieu, l’Absolu, que l’on ne nomme jamais en hébreu. Un cours simple et humoristique de philosophie kabbalistique.
C’est un autre romancier-philosophe, Boualem Sansal qui parle depuis l’Algérie où il vit, tout en dénonçant les dérives dictatoriales et islamistes. Son dernier roman « Vivre, le compte à rebours » vient de paraître chez Gallimard. C’est une dystopie tragique : la terre va disparaitre et seule une petite poignée de privilégiés va pouvoir prendre place dans un vaisseau spatial. Derrière cette fable grinçante (on imagine sans peine tous les mauvais coups pour faire partie des élus), se cache une perception angoissante du monde actuel. Entre les menaces écologiques et les terreurs religieuses, la catastrophe est-elle inéluctable ? Faut-il accepter le pire pour espérer lui échapper ? Un auteur courageux et pessimiste qui n’a jamais baissé les bras.
On a beaucoup écrit sur Marilyn Monroe ; Tatiana de Rosnay s’y essaie à son tour avec « Poussière Blonde » paru chez Albin Michel. Au cours du tournage des « Misfits », son dernier film, Marilyn est au plus mal. Arthur Miller, son époux, utilise leurs problèmes de couple pour écrire le scénario. L’auteure imagine la conversation de l’actrice avec une femme de chambre du Mapes hôtel où réside l’équipe de tournage. Le drame couve …
Jean-Luc Aubarbier.
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Essor Sarladais du 5 avril 2024.